Confinement

Homélie du 8 novembre (dimanche)

P. Xavier Grandpierre

Notre rapport à la Sagesse (avec un « S » majuscule), c’est-à-dire avec le Dieu vivant, est d’une très grande importance. « Il est illusoire de penser qu’il suffit de croire en Dieu, pour être véritablement uni au Christ au cours de nos journées » a dit le cardinal Vanhoye. Sinon nous risquons de penser qu’il y a peut-être un Dieu, mais un Dieu qui nous oublierait facilement ; comme nous faisons pour lui. Et alors, il n’y aurait soit disant plus que des hommes qui devraient se débrouiller pour survivre.

La Parole de Dieu est très claire sur ce point ; la réalité est complètement inverse, et il est possible que nous ayons à l’apprendre patiemment à nos dépens. Nous avons un Dieu qui, dans sa Sagesse, se montre toujours aux hommes le premier. Avec le Christ, nous savons que l’Esprit Saint est le premier auteur de la présence de Dieu sur terre. Il inspire, aime l’humanité et le Fils de Dieu a été jusqu’à se rendre “petit d’homme” en la Vierge Marie par l’Esprit Saint.

La Sagesse « va et vient pour rechercher ceux qui sont dignes d’elle ». Dieu passe sa vie éternelle si l’on peut dire, à essayer de rencontrer dans notre temps les hommes qui pourtant cherchent à vivre en l’ignorant. Là est la vérité de l’humanité blessée par le péché, mais cela n’a jamais découragé Dieu. Il veut au contraire rencontrer les hommes pour les combler de son amour de Père donné en Jésus, dont ils ont tant besoin.

Beaucoup d’entre nous disent avoir renoncé à Dieu, car Dieu ne les a, selon eux, jamais soutenus dans les épreuves : c’est le refrain de notre génération. Mais avons-nous vraiment cherché le Seigneur déjà présent, autant qu’il nous cherche dans notre nuit ? Lui avons-nous laissé, comme lui envers nous de la crèche au crucifiement (comme dit un cantique de Noël pour parler de Jésus par sa vie entière), lui avons-nous laissé à un moment tout le reste, pour le préférer afin qu’il nous rencontre, lui qui seul nous fait tenir dans l’être ? Il nous donnera ainsi de porter du fruit selon sa volonté qui est toujours bonne, comme nous l’assure le Notre Père.

« Si nous nous laissons guider par nos inclinaisons humaines, par ce qui retient notre intérêt, alors notre vie est stérile et nous n’accumulons aucune réserve d’huile pour notre lampe. » (card. Vanhoye) On peut se poser cette question : mesurons-nous suffisamment nos attachements humains, à la lumière de Dieu ? Afin d’espérer en Celui qui, depuis notre baptême, ne cesse chaque jour de se faire connaître à nous humblement en Jésus. J’en doute fortement, alors que là est la vérité de nos vies, derrière laquelle notre époque en s’épuisant, sans se l’avouer ou sans le savoir, ne cesse en fait de courir.

Cependant, nous avons écouté Dieu dans sa Parole ce dimanche, qui nous encourage à changer nos habitudes : « la Sagesse se laisse trouver par ceux qui la cherchent ». Ainsi, qui renoncera à bien des attachements à lui-même pour prier Dieu dès l’aurore, ne le regrettera pas : il ne se fatiguera pas pour trouver la Sagesse assise à sa porte, déclare la Sainte Écriture. Cela donne une grande espérance à ceux qui veulent vivre la vie de leur baptême, de se confier de tout leur être à Dieu dès le matin en se mettant à l’écoute de sa Parole. Relisons donc la 1ère lecture pour l’appliquer concrètement.

Une simple prière du matin peut vraiment nous aider à chasser au lever nos premières impressions souvent hésitantes, voire de mauvaise humeur, ou même peureuses. Avec ou sans support d’un texte, la remise de soi-même au Seigneur, même si ça n’est jamais parfait, donne la permission à Dieu de nous rejoindre tel qu’il est pour toujours ; généreux, vivant d’un amour pur et sans calcul avec nous.

« Celui qui veille en son honneur sera délivré de tout souci… [à ceux-là,] la Sagesse apparaît avec un visage souriant… Chaque fois qu’ils pensent à elle, elle vient à leur rencontre. » Le Dieu de l’Ancien Testament, contrairement à ce qu’une mauvaise coutume fait dire de lui, est donc bien loin d’être sévère, vous l’avez entendu. Tout cela nous encourage à un programme spirituel nouveau ; désirable même. Personne à part nous-mêmes ne saurait nous empêcher de faire nos premiers pas de confiance en la Sagesse de Dieu, ou de prolonger les pas déjà faits. Nous avons au cours de la journée de multiples occasions de nous tourner plus souvent et franchement vers la Sagesse divine, en commençant par le recueillement intérieur. Prôné par saint Philippe Néri, ce recueillement même momentané est, je vous le concède, une révolution par rapport aux modes de vie communs. Mais c’est le mode de vie proprement humain que Dieu dans sa Parole ouvre à l’homme et qui l’entraînera à la vie fraternelle. Il s’agit de chercher Dieu à la place où il est dans nos vies : c’est-à-dire la première. Il est pour chacun de nous à la place du serviteur depuis le lavement des pieds. Ce qui en retour faisait dire à sainte Jeanne d’Arc, bien consciente de cette grâce : « Dieu premier servi. »

Comme beaucoup le remarquent, il ne faut pas penser que nous trouverons Dieu, si nous lui faisons de la place seulement quand nous avons du temps à perdre… Comme ce n’est pas du tout sa manière d’être avec nous puisqu’il se donne sans réserve, nous risquerions de ne jamais le rencontrer vraiment. Favoriser la prière du matin, c’est en particulier continuer dans la semaine la grâce du dimanche de la résurrection du Christ ; où chacun dans l’Église est invité à se dessaisir quelques instants de soi-même, pour accueillir tout l’amour de Dieu.

Les vierges insensées et les vierges sages invitées aux noces, sont l’expression peut-être la plus nette de l’Évangile, pour marquer une différence dans la situation de faiblesse que partage toute l’humanité. Toutes les jeunes filles en effet à un moment sont rattrapées par le sommeil. Mais l’Évangile insiste sur la rencontre d’amour avec le Christ qui vient éclairer chaque vie humaine. Jésus se présente avec la joie de l’Époux qui revient et qui s’est fait longuement attendre. C’est lui qui ravive alors la prière de l’Église, en nous demandant de garder nos lampes allumées, pour que nous puissions découvrir à chaque instant, dans le regard du Seigneur, de quel amour immense nous sommes aimés depuis toujours.

En ces jours, désirons profondément cette présence du Seigneur et disons-le lui dans notre prière ; afin qu’il puisse sceller actuellement en nous sa nouvelle Alliance, par l’autorisation officielle de la célébration des sacrements et en particulier de la messe.

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  • nicole galand Reply
    8 novembre 2020 at 8 h 03

    Merci pour cette magnifique homélie ,qui demandera à être ,lue et relue tant elle est profonde.
    Elle apporte un grand soutien dans cette période douloureuse que nous traversons ,nous qui sommes privés de la Grâce des sacrements !
    MERCI

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