Confinement

Homélie du IIIe Dimanche de Pâques

Chers frères et sœurs,

En ce dimanche du Bon Pasteur, nous venons d’écouter le début du chapitre 10 de l’évangile selon saint Jean. Ce chapitre constitue un diptyque avec celui qui précède, le chapitre sur la guérison de l’aveugle-né. Aussi, pour mieux entendre le passage que nous avons reçu aujourd’hui, permettez que je fasse un "résumé des épisodes précédents", traduit dans la liturgie par « en ce temps-là ». Après la guérison de l’aveugle-né, un procès est mené par « les Juifs » c’est-à-dire les autorités religieuses de Jérusalem, qui gravitent autour du Temple. Ces "modèles" du peuple refusent de croire à cette guérison qui a eu lieu le jour du sabbat. Eux, les gardiens de l’Enclos, c’est-à-dire la Cour du Temple, menacent d’exclusion de la synagogue (de l’Assemblée du Peuple élu) toute personne qui reconnaîtrait Jésus comme le Christ-Messie. Ces "bergers", ces prétendus "gardiens des âmes" exercent une telle emprise sur les consciences que les brebis d’Israël sont privées de leur liberté. Pourtant, ne se réclament-ils pas de Moïse, berger, qui, avec la houlette reçue du Seigneur, a libéré le peuple de l’esclavage de l’Égypte et l’a conduit jusqu’au « vert pâturage » de la Terre promise. Hélas, souvenons-nous de la peur des parents de l’ancien aveugle, qui n’osent même plus défendre la chair de leur chair (cf. Jn 9, 18- 23). Finalement, l’ancien aveugle "prend la porte" : il est exclu, jeté dehors (cf. Jn 9, 34). Sur ces entrefaites, Jésus le retrouve. L’ancien aveugle n’entrera plus dans le Temple de Jérusalem, mais Il retrouve Jésus, le Temple véritable (cf. Jn 2, 21). Il est recueilli dans la communauté des disciples, l’Église, le Temple Nouveau. Il est devenu disciple : « "Crois-tu au Fils de l’homme ?" […] Il dit : "Je crois, Seigneur !" » (Jn 9, 35.38). Dans ce contexte, Jésus dialogue avec des pharisiens qui ont tout suivi de cette affaire (cf. Jn 9, 40). Fin du résumé.

Tout commence avec une déclaration solennelle : « Amen, amen, je vous le dis : celui qui entre dans l’enclos des brebis sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit » (Jn 10, 1). C’est une sentence irrévocable ! Il n’y a pas "36 solutions" : soit on est berger, soit on est un voleur et un bandit. Le critère : passer par la porte. Comme c’est LE critère, Jésus ne tarde pas à produire une seconde sentence solennelle : « Amen, amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis » (Jn 10, 7). Jésus seul peut pénétrer jusqu’au cœur des brebis, Lui notre « berger, le gardien de nos âmes » (cf. 1 P 2, 25). Quiconque veut y accéder lui aussi, être pasteur et berger, doit passer par Jésus. Celui qui veut atteindre quelqu’un profondément, pour faire de lui un disciple doit passer par le Christ. Jésus doit être son « modèle » (1 P 2, 21) au sens le plus fort du terme. Il doit être configuré au Christ jusqu’au fond de son être. Puis, il doit se laisser sans cesse transformer en Lui. Sinon, ce faux berger sera un voleur et un brigand. Personne n’a le droit d’entrer par effraction, en escaladant par un autre endroit, dans le sanctuaire du cœur de l’homme, de sa conscience, de sa liberté. Pour nous prêtres, configurés au Christ-Tête de son peuple qui est l’Église, par le sacrement de l’Ordre, il nous est bon de vérifier souvent que nous n’attirons pas à nous ou à notre profit (tel un gourou) mais au Christ. Il nous est bon de vérifier que les gens sont libres de nous quitter, sans que cela nous mette dans tous nos états, pour aller librement et toujours plus vers le Seigneur. Nous sommes ministres, c’est-à-dire serviteurs de votre profit, de votre Salut, chers frères et sœurs ; vous n’avez pas à être nos groupies ou nos esclaves, même "volontairement" ou par affection pour nous. « Le prêtre ne l’est pas pour lui, disait le saint Curé d’Ars, il l’est pour vous ! »

Puis, Jésus insiste : « Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage » (Jn 10, 9). Ceux qui, lors d’une année jubilaire, passent une porte jubilaire, font mémoire de cela : Jésus est l’Unique Porte qui nous ouvre au Salut, tout comme Il est l’Unique Chemin qui mène au Père (cf. Jn 14, 6). Car, Lui seul, Jésus, est la Vie. Lui seul Jésus nous donne la vraie Vie, la Vie éternelle, celle qui ne vient pas de la terre, mais du ciel (cf. Jn 6, 51). Lui seul, Jésus, a aimé l’humanité jusqu’à mourir pour elle, pour en faire l’Église, son Épouse. Pour nous prêtres, configurés au Christ-Tête de l’Église, par le sacrement de l’Ordre, il nous faut vivre aussi ce que dit saint Paul aux époux (maris) : « Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle » (Ep 5, 25). « Le prêtre ne l’est pas pour lui, disait saint Jean-Marie Vianney, il l’est pour vous ! »

La semaine dernière, les textes des messes de semaines nous faisaient entendre le discours de Jésus sur le Pain de Vie, c’est-à-dire l’Eucharistie. Parce que nous sommes ministres des sacrements, nous prêtres, avons accès au Corps sacramentel du Christ. C’est une grande grâce : que Dieu soit béni ! Mais attention à ne pas avoir un rapport "magique" aux sacrements. Attention, chers frères et sœurs, à ne pas tomber dans une sorte de mauvaise "jalousie", sous le bon prétexte qu’un chrétien ne peut pas vivre sans l’Eucharistie. Notre désir de l’Eucharistie est trop grand et trop beau pour tomber si bas ! Vous manquez à nos célébrations, car l’Eucharistie est profondément ecclésiale. Votre sacerdoce, le sacerdoce commun des fidèles, est indissociable du sacerdoce ministériel. Et, l’Eucharistie est le "lieu" où ils s’exercent et s’articulent l’un à l’autre de manière éminente. Le sacerdoce ministériel (les prêtres) est l’instrument et le moyen par lequel est donnée la grâce de Salut venue du Christ ; le sacerdoce baptismal est l’achèvement, l’accomplissement et la fin de cette grâce. Indissociablement ! Configurés au Christ-Tête de son Corps qui est l’Église, par le sacrement de l’Ordre, et configurés au Christ prêtre-prophète-roi, par le sacrement du Baptême, « en toute circonstance, offrons à Dieu, par Jésus, un sacrifice de louange » (He 13, 15). « Le prêtre ne l’est pas pour lui, il l’est pour vous ! »

2 commentaires

  • Isabelle Bridet Reply
    3 mai 2020 at 8 h 45

    Alors là, c’est vraiment ça…une mauvaise jalousie, parce que quoi d’autre me fait dire que l’eucharistie me manque ? Je ne sais tellement pas ce que je fais, ou ce qui m’arrive quand je m’apprête à recevoir le corps du Christ, et après l’avoir reçu, en quoi suis-je totalement bouleversée ?
    Pas digne de Le recevoir, et ce jeûne eucharistique a au moins le mérite de faire réfléchir. Le danger, finalement, c’est que j’ arrive à m’en passer. Or c’est Lui qui agit en moi, or nous chantons devenez ce que vous recevez…

    A tous nos prêtres de l’Oratoire, bon dimanche. Merci à vous.
    Prions pour vous et pour Jean-Gabriel.

  • nicole et jean Reply
    3 mai 2020 at 10 h 13

    Ce dimanche ,journée des Vocations , nous prions pour ceux et celles qui prennent un engagement quel qu’il soit ,
    mais plus particulièrement nous peuple de Dieu ,nous portons nos prières vers la Très Sainte Vierge Marie , Mère des Prêtres du monde entier, qu’Elle nous aide à demander au Seigneur de nous envoyer de nombreux ouvriers à Sa moisson . Nous prions pour nos Pasteurs qui ont consacré leur vie au Seigneur , nous donnent les Sacrements et nous
    expliquent les Saintes Ecritures .
    Que Dieu les protège et prenne soin d’eux!

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