Confinement

Homélie du 1er novembre

Chers frères et sœurs,

En cette fête de la Toussaint, dans un contexte un peu spécial, j’aimerais poser quelques questions. Avons-nous été saisi par le beau mystère que notre foi professe “Je crois en Dieu, […] Créateur […] de l’univers visible et invisible” ? Avons-nous conscience de tout ce qui signifie cet article du Credo “Je crois en la communion des saints” ? Quels sentiments nous saisissent quand le livre de l’Apocalypse déclare : « voici une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main » (Ap 7, 9). En un mot : chrétiens, savons-nous à quel peuple nous appartenons ? Savons-nous que nous appartenons au peuple des saints ?

Alors que le confinement va nous ramener à une certaine forme de solitude, la solennité de la Toussaint nous rappelle que nous ne sommes pas pour autant isolés, ni abandonnés. Alors qu’en ce moment, de nombreux ferments de défiance, de division et de haine peuvent s’immiscer très facilement dans nos cœurs, nous sommes convoqués par le Seigneur, en ce dimanche de Toussaint, nous sommes appelés à prendre le chemin de la fraternité. Ainsi, pour reprendre les termes du Pape François dans sa dernière encyclique : « Nous, croyants, nous pensons que, sans une ouverture au Père de tous, il n’y aura pas de raisons solides et stables à l’appel à la fraternité. Nous sommes convaincus que “c’est seulement avec cette conscience d’être des enfants qui ne sont pas orphelins que nous pouvons vivre en paix avec les autres”. En effet, “la raison, à elle seule, est capable de comprendre l’égalité entre les hommes et d’établir une communauté de vie civique, mais elle ne parvient pas à créer la fraternité” » (Fratelli tutti, n. 272). Chers frères et sœurs, en cette Toussaint, tenons-nous nous aussi « devant le Trône et devant l’Agneau » unis à tous nos frères, revêtus de la robe du Baptême, la palme des vainqueurs à la main.

Fils et filles de Dieu, reconnaissons que Dieu est notre Père. Demandons-lui d’aimer nos frères et de désirer être en communion avec eux, surtout ceux qui risquent d’être isolés dans le mois qui s’ouvre aujourd’hui. Demandons-Lui encore un cœur généreux, « un cœur d’enfant, pur, transparent, qu’aucune ingratitude ne ferme, qu’aucune indifférence ne lasse » (cf. Prière de Léonce de Grandmaison), un cœur qui se donne. Car, ainsi que le rappelle le Pape François : « C’est pourquoi, si je réussis à aider une seule personne à vivre mieux, cela justifie déjà le don de ma vie. C’est beau d’être un peuple fidèle de Dieu. Et nous atteignons la plénitude quand nous brisons les murs, pour que notre cœur se remplisse de visages et de noms ! » (Evangelii gaudium, n. 274 ; cité dans Fratelli tutti, n.195).

Enfin, puisque nous ne sommes pas orphelins, vivons pleinement dans la communion des saints. Bien sûr, pendant ce confinement, l’utilisation de chaines d’infos, du téléphone, d’Internet et des réseaux sociaux, va prendre une certaine place. Oui, ces moyens sont utiles, s’ils restent des moyens : mais ils ne donnent pas le salut. Seul le Christ sauve et rassemble. Écoutons encore le Pape : « le coup dur et inattendu de cette pandémie hors de contrôle a forcé à penser aux êtres humains, à tous, plutôt qu’aux bénéfices de certains. Aujourd’hui, nous pouvons reconnaître que “nous nous sommes nourris de rêves de splendeur et de grandeur, et nous avons fini par manger distraction, fermeture et solitude. Nous nous sommes gavés de connexions et nous avons perdu le goût de la fraternité. Nous avons cherché le résultat rapide et sûr, et nous nous retrouvons opprimés par l’impatience et l’anxiété. Prisonniers de la virtualité, nous avons perdu le goût et la saveur du réel.” La douleur, l’incertitude, la peur et la conscience des limites de chacun, que la pandémie a suscitées, appellent à repenser nos modes de vie, nos relations, l’organisation de nos sociétés et surtout le sens de notre existence » (Fratelli tutti, n. 33). Frères et sœurs, demandons, dès maintenant, les grâces qui nous permettront d’être, dans le quotidien, des Bons Samaritains les uns pour les autres. Et pour commencer, “descendons du TGV”, prenons le temps de nous arrêter auprès de Dieu et de notre prochain, notre frère. Soyons capables de prendre quelques minutes pour Dieu, pour nous mettre à son rythme ; quelques minutes pour un frère dans sa fragilité, à son rythme. Ne soyons pas des angoissés, qui thésaurisons notre temps : donnons du temps ! (cf. Fratelli tutti, n. 63). Ainsi, si beaucoup seront seuls, que personne ne soit abandonné. Confinement ou pas, relevons le défi de vivre la Communion des saints : nous vivons dans une communion qui englobe le ciel et la terre. Aussi, “à nos chapelets !” pour être proches du Christ, par Marie ; et “à nos téléphones” pour rester proches de ceux que nous osons appeler “nos proches”.

Chers frères et sœurs, aujourd’hui plus que jamais, le Seigneur nous tend la main pour nous faire prendre concrètement le chemin de la charité et de la sainteté. Pour nous donner du courage, n’oublions pas la musique : « nous, chrétiens, nous ne pouvons pas cacher que “si la musique de l’Évangile cesse de vibrer dans nos entrailles, nous aurons perdu la joie qui jaillit de la compassion, la tendresse qui naît de la confiance, la capacité de la réconciliation qui trouve sa source dans le fait de se savoir toujours pardonnés et envoyés. Si la musique de l’Évangile cesse de retentir dans nos maisons, sur nos places, sur nos lieux de travail, dans la politique et dans l’économie, nous aurons éteint la mélodie qui nous pousse à lutter pour la dignité de tout homme et de toute femme” » (Fratelli tutti, n. 277).

Chers frères et sœurs dans le Christ, n’ayons pas peur d’être des saints !


P. David Vaimbois

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  • Isabelle Bridet Reply
    2 novembre 2020 at 21 h 50

    Merci David ! Pour ce qui est de donner un peu de temps au Seigneur et à nos frères, dans ce contexte, nous n’aurions que peu d’excuses si nous nous dérobions, mais le risque est toujours grand de nous recroqueviller et de passer en mode hibernation. Merci , entre autres, pour la citation concernant la musique de l’Évangile : elle est très belle !

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